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10 juin 2009 3 10 /06 /juin /2009 16:37

L’occupation d’écrire a pour principal avantage de ne nécessiter qu’un bagage matériel et technique des plus rudimentaire : un crayon, des feuilles, et pour les noircir un apprentissage basique dispensé en général sur les bancs de l’école élémentaire.

Cette facilité de mise en œuvre fait de l’écriture l’activité « artistique » la plus démocratique au monde. De là à se proclamer écrivain sous prétexte que l’on a rempli de pattes de mouche quelques cahiers d’écolier, il y a un gouffre que d’aucuns pourtant n’hésitent pas à franchir. Ils auraient d’ailleurs tort de se gêner.

Tout simplement parce qu’il est si laborieux et chronophage d’évaluer un écrit que la grande majorité de ces chenapans peut se rengorger en toute impunité. C’est pour cette raison que lorsqu’un ami déclare « J’ai écrit un roman (ou je suis romancier) » on a tendance à le croire sur parole, sans même la plupart du temps demander à étudier l’objet de tant de forfanterie. Un rapide coup d’œil à l’épaisseur du volume, éventuellement complété d’un feuilletage superficiel suffira bien à valider les assertions de votre valeureux camarade.

 

D’où le nombre impressionnant d’individus qui s’autoproclament écrivain et se targuent de ce statut, tout simplement parce que personne n’a eu le courage de se pencher sur leur prose (je ne parle évidemment pas de la proche famille, du conjoint, bref, de tous ces gens génétiquement programmé à adorer sans recul ).

En somme, la majorité des écrivains en devenir seraient tout bonnement ce que les médecins psychiatres appellent dans leur jargon, des «  imbéciles heureux », contemplant du haut de leur tour en carton le monde qui les ignore.

Cela dit, ils ne réalisent sans doute pas la chance qu’ils ont !

Prenons à présent le gars lambda qui désire non pas devenir écrivain, mais plutôt auteur-compositeur-interprète. Il va devoir, avant de se lancer, apprendre à chanter, éventuellement jouer d’un instrument, maîtriser des logiciels d’enregistrements complexes, bref, des années de travail acharné pour finalement entamer son grand œuvre, à savoir un morceau de musique de 2mn30. Mais le pire n’est pas là. Le pire, c’est quand il déclarera à un ami « Je suis auteur-compositeur-interprète», et que l’autre demandera sur-le-champ à écouter un échantillon. Ben oui, on peut tout de même bien consacrer 2mn30 à un bon copain. Et au bout de cette poignée de seconde, le verdict tombera, soit encourageant, soit ruinant en partie les espoirs de notre jeune artiste, et accessoirement des années de travail et d’investissement.

C’est pourquoi on dénombre beaucoup moins d’aspirants auteurs-compositeurs-interprètes que d’aspirants écrivains.

Maintenant, imaginons un outil magique qui permettrait à n’importe quel auteur-compositeur-interprète en herbe de se lancer à corps perdu dans un maelstrom de création, en ignorant tout de la musique et de la technique, de telle sorte qu’il se trouverait enfin à pied d’égalité avec l’apprenti écrivain.

Eh bien figurez-vous que cet outil magique existe ! Il s’appelle Songsmith, et a été élaboré par quelque cerveau malade dans les laboratoires secrets de Microsoft ® .

Enfin, il est possible d’établir un parallèle équitable entre ces deux arts en faisant abstraction totale de ce qui les sépare habituellement (en gros un apprentissage long et fatiguant).

Enfin, le monde ébahi possède à portée d’oreille un équivalent sonore aux productions des écrivains amateur !

Curieux comme vous êtes, j’imagine que vous trépignez d’impatience à l’idée de découvrir un tel phénomène.

Pour commencer, voici donc la pub amoureusement concoctée par Microsoft ® afin de vanter les mérites sans fin de son produit. C’est en anglais, mais je vous assure qu’il n’est pas nécessaire de maîtriser la langue de Shakespeare pour comprendre de quoi il retourne.

 

 

 

Bien sûr, vous allez dire que cette petite fille, bien que tout à fait attendrissante, chante très mal, et que c’est pas de jeu. Par ailleurs, c'est facile pour son papa de chanter aussi bien, puisqu'il s'agit tout bonnement d'Alain Souchon avec des lentilles, fraîchement sorti de chez le coiffeur.

Très bien.

Imaginons donc que, bien que totalement inculte en solfège, vous possédez néanmoins un joli brin de voix. De plus, par comble de chance, vous détenez une mélodie très sympathique dans vos cartons. Ne cherchez pas plus loin : songsmith est votre ami !


Voici le résultat :


 



Mais où veut-il en venir avec ses comparaisons fumeuses, et ses parallèles oiseux ?

Tout simplement à ceci : il en va de l’écriture comme de la musique : si on ne maîtrise pas les techniques nécessaires, nos belles idées, aussi talentueuses soient-elles, finiront immanquablement par accoucher de petites choses ridicules et risibles.

 

C’est envoyé, hein ?


***

 

 

BONUS : grâce à Songsmith, Van Halen se transforme en combo de jazz tout à fait convaincant...

 

 

 

 

 

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14 mai 2009 4 14 /05 /mai /2009 15:26

Vos tiroirs regorgent de manuscrits inachevés, pauvres avortons manchots auxquels il manque le plus souvent la tête et les jambes, ex futurs chef-d’œuvre définitivement relégués dans les poubelles de la littérature ? L’heure de la revanche a enfin sonné sous la forme d’un concours à l’issue duquel sera désigné « le prix Bartleby du roman inachevé ».

Cette entreprise salutaire est ouverte à tous et on ne peut craindre qu’une chose : un écroulement massif du réseau si tous ceux qui ont un taquiné un jour du stylo envoient le fruit de leur labeur.

 

PRIX BARTLEBY

 


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29 avril 2009 3 29 /04 /avril /2009 11:53

Une fois n’est pas coutume, je m’adresse solennellement à mes distingués lecteurs pour leur demander un petit coup de main.

Voilà le topo : travaillant actuellement à la rédaction d’un futur ouvrage, je suis à la recherche d’« idées reçues » concernant la littérature dans son ensemble, les écrivains, l’écriture, l’édition…

Voici un exemple qui peut vous éclairer : «  Il suffit d’être inspiré pour écrire un roman ». Je précise pour éviter tout malentendu que ma requête est des plus sérieuses, et qu’en conséquence, les propositions du genre « Marc Lévy écrit comme un cochon » ne pourront pas être retenues. D’autant qu’il ne s’agit pas là d’une idée reçue, mais d’une vérité établie.

 

J’embrasse sur le front et par anticipation tous ceux qui apporteront leur pierre au majestueux édifice que je suis en ce moment même occupé à bâtir (j’ai déjà creusé le parking souterrain).


 

"Il faut être chauve et porter des lunettes pour avoir du talent"

 

 

EDIT : Merci à tous pour vos contributions ! Je remarque que, comme souvent dans les idées reçues, certaines reflètent une part de vérité. Les plus intéressantes sont celles qui circulent beaucoup mais n'ont néanmoins que très peu de fondement ("Pour écrire il faut être malheureux"...). Le mythe de Nerval a la vie dure !

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27 mars 2009 5 27 /03 /mars /2009 16:16
Comme vous le savez, l'humour est un domaine où il faut se montrer extrêmement prudent. Tout simplement parce que l'on ne rit pas de la même chose, et que certains livres jugés désopilants par certains seront tenus pour sinistres par d'autres. (voir illustration).
Aussi, suite à la demande de Stéphanie, pimpante lectrice de 78 ans qui nous écrit d'un petit village du Loir-et-Cher (mais les informations restent à vérifier), nous allons tenter, sur la pointe des pieds, de vous présenter une petite sélection de livres drôles, ou qui font rire, ou humoristiques, enfin appelez ça comme vous voudrez.


J'ai remarqué que bien souvent, les livres drôles comptent peu de pages, sans doute parce que les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures. Mais il y a des exceptions, comme Hornby, par exemple.

 Sans nouvelle de Gurb - Eduardo Mendoza

Deux extraterrestres débarquent à Barcelone pour une mission d'étude. L'un des deux, le fameux Gurb, tente une première sortie de reconnaissance. Pour passer inaperçu, il se transforme en Madonna. Bien sûr, il ne réapparaît pas et son collègue, inquiet, part à sa recherche. Culte, comme diraient les publicitaires qui voient du culte partout (sauf que là, c'est vrai).

 Destins tordus - Woody Allen
 Il y a des hauts et des bas dans les écrits de Woody Allen, mais ce petit recueil a pour avantage de ne compter que des hauts. Je vous conseille particulièrement l'histoire de ce professeur de littérature qui, à l'aide d'un mage, entre littéralement dans l'univers des romans pour aller dragouiller Madame Bovary et autres héroïnes de papier.


Et qui va promener le chien ? - Stephen Mc Caulay
Des personnages, majoritairement homosexuels, en pleine déroute affective, dans un environnement haut en couleur. A noter, le portrait du chien, irrésistible. Pour les hétérosexuels dubitatifs : rassurez-vous, les mécanismes sentimentaux sont les mêmes, quelle que soit la préférence sexuelle...

Des femmes qui tombent - Pierre Desproges
Oui, Desproges s'est essayé au roman, avec bonheur il faut le dire. On retrouve ici tout ce qui fait son style, au service d'une histoire aussi improbable que structurée.


Richard Brautigan- Un privé à Babylone
Brautigan est un poète. Autant dire que son histoire de privé nage dans l'absurde le plus total et la drôlerie la plus débridée.

Nick Hornby -  Haute fidélité  - A propos d'un gamin - La bonté mode d'emploi
Avec lui, on ne sait pas trop lequel choisir. C'est drôle, généreux, un peu comme du Gavalda qui serait vraiment réussi.


J’en ai probablement oubliés, qui me reviendront plus tard. La liste peut bien évidemment être poursuivies par vos soins dans les commentaires…

Personnes venant d'achever la lecture des "Bienveillantes"
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26 mars 2009 4 26 /03 /mars /2009 10:54
Lundi matin, c’était un litre d’huile de vidange qu’on déversait dans ma boîte aux lettres, recouvrant d’une même onctuosité poisseuse le sémillant pull jacquard que j’avais commandé à La Redoute et le courrier extatique de mes nombreuses admiratrices (EDF, GDF, France Télécom, etc).
Hier, c’était une imposante déjection canine enveloppée de papier hygiénique enflammé que l’on déposait sur mon paillasson, avant que de tambouriner à ma porte.
Je dois avouer que je suis particulièrement sensible à ces petits signes amicaux qui de toute évidence ne poursuivent qu’un seul objectif : m’encourager à publier un nouveau billet sur mon blog. C’est donc de bonne grâce, et avec la gorge nouée par l’émotion, que je m’exécute.
 Mais pour dire quoi exactement ?
Je n’en n’ai pas la moindre idée. Car le problème est là, face à moi, imposant (2,10 m, pilosité extravagante, petits yeux méchants): Quel sujet traiter ?
Il y avait bien le salon du livre début mars, mais je ne m’y suis pas rendu, préférant passer mon week-end à batifoler nu dans le bois de Vincennes, une lyre à la main, taquinant la muse à grands coups d’alexandrin fleuri (ma garde à vue s’est bien passée, merci). Et puis il faut bien avouer que l’idée de tomber entre les mains de narco-traficants mexicains hirsutes et mal élevées qui m’auraient fait boire de la tequila jusqu’à plus soif dans un décor de lupanar tijuanais ne m’enchantait guère.
C’est dire si actuellement le monde de l’édition et ses turpitudes me passent très largement au-dessus du bonnet.

Maintenant, si un de mes fidèles lecteurs portait en son sein un sujet d’article que je pourrais éventuellement traiter, je l’étudierai avec la plus grande attention.

Quant au fidèle lecteur qui a enflammé et cochonné mon paillasson, il peut me faire parvenir un chèque de 24,90 qui correspond très précisément à la somme versée au magasin Ikéa pour l’acquisition d’un nouveau paillasson, modèle « Nordejuk ». Merci.


Un nouveau paillasson à mon image : sobre, élégant, distingué.
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28 janvier 2009 3 28 /01 /janvier /2009 15:29

Dans un précédent article intitulé « Pourquoi achète-t-on un livre ? » je démontrai avec une maestria incomparable que la 4ème de couverture des romans agissait sur le lecteur comme une véritable incitation à passer au plus vite à la caisse.

Il existe toutefois des exceptions, comme vient de me le rappeler une lectrice de ce blog, Fanny S. Pour le prouver, elle m’a envoyé la 4 de couv’ (comme on dit dans les milieux autorisés) du dernier roman de Paul Auster « Seul dans le noir », aux éditions Actes Sud.

Je vous la transmets à mon tour, afin que vous puissiez juger sur pièce:


« En plaçant ici la guerre à l’origine d’une perturbation capable d’inventer la ‘catastrophe’ d’une fiction qui abolit les lois de la causalité, Paul Auster établit, dans cette puissante allégorie, un lien entre les désarrois de la conscience américaine contemporaine et l’infatigable et fécond questionnement qu’il poursuit quant à l’étrangeté des chemins qu’emprunte, pour advenir, l’invention romanesque. ».

 

Voilà, si vous avez compris quelque chose, et surtout si cet improbable galimatias vous a donné envie de lire le livre en question, n’hésitez pas à le clamer haut et fort dans les commentaires…


Et en plus, il parait
qu'il n'y a même pas d'image

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16 janvier 2009 5 16 /01 /janvier /2009 11:24
Pour ceux, dépourvus d’imagination et de personnalité, qui seraient tentés d’étudier le marché afin de savoir dans quel genre donner afin de se faire publier, le Figaro publie le « top ten » des plus gros vendeurs.
 Cette liste, hautement prévisible, laisse effectivement entrevoir quelques pistes aux auteurs en devenir.
Alors, que faut-il mettre dans son roman pour cartonner auprès des éditeurs ?
 En premier lieu, du sentiment, beaucoup de sentiment, bien rose et collant comme des bonbons à la liqueur. Surtout n’hésitez pas à avoir la main lourde : les lecteurs raffolent de cette mélasse, ils pensent que la vraie vie se trouve là, précisément.
Ensuite, une pincée de mystère, genre phénomène paranormal, « je discute avec les morts et ça me fait tout drôle », ou alors un zeste de tracasseries policières, au choix.
Parmi les ingrédients qui ont fait leur preuve en 2008 (et qui perdureront probablement en 2009, rassurez-vous), on peut également ajouter dans la marmite un peu de fantaisie fofolle et bon enfant, mais sans forcer la dose, vous épouvanteriez le lecteur.
Vous pouvez également vous risquer à incorporer quelques grains de « visions visionnaires » dans un cadre vaguement futuriste, mais attention : il semblerait que le public commence à se lasser de cette sauce un peu trop riche en graisse.
Vous pouvez finaliser votre ragoût en ajoutant une cuillérée de pensées profondes, du genre qu’on trouvait sur le dos des gaufrettes autrefois, et qui faisaient le bonheur des enfants en bas âge.

PS : Il y a évidemment des ingrédients auxquels vos modestes moyens ne vous donnent pas accès, comme par exemple être titulaire du prix Nobel. Le Nobel fait vendre, c’est mathématique. Ou d’avoir un précédent roman qui vient d’être porté à l’écran. Même si c’est un navet, l’effet médiatique contribuera à relancer les ventes de l’ensemble de la production.

Marc Levy - 1 516 000 exemplaires
Guillaume Musso - 1 378 000 exemplaires
Fred Vargas - 1 082 000 exemplaires
Anna Gavalda - 1 004 000 exemplaires
Amélie Nothomb - 734 000 exemplaires
Katherine Pancol - 696 000 exemplaires
Bernard Werber - 612 000 exemplaires
Jean-Marie Le Clézio - 497 000 exemplaires
Éric-Emmanuel Schmitt - 496 000 exemplaires
Muriel Barbery - 401 000 exemplaires




A N : le prix Nobel lui aurait probablement permis
 de monter à la première place. Mais ce n'est que partie remise.

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15 janvier 2009 4 15 /01 /janvier /2009 15:54
Un recueil de nouvelles (auquel j’ai apporté ma modeste contribution) vient de sortir. On y trouve des histoires inédites de Jean Philippe Blondel, Valentine Goby, Véronique Ovaldé, entre autres.
 
Toutes, richement illustrées, ont p
our thème la route. D’ailleurs, le recueil s’appelle fort à propos « La route en toutes lettres ». Cet ouvrage n’est pas disponible dans le commerce. Il y a toutefois deux solutions pour se le procurer gratuitement (car il n’est pas à vendre non plus).
- Etre abonné à l’une des « lettres » publiées par les éditions EDIMARK, qui s’adressent avant tout aux médecins spécialistes.
 - Rendre une visite amicale à la librairie L’Astrée, sise 69 rue de Levis, dans le 17e arrondissement de Paris, qui dispose d’un certain nombre d’exemplaires.

J’en profite pour signaler à ceux qui habiteraient dans le coin que cette excellente officine organise régulièrement des rencontres dédicaces avec des auteurs ( Fred Vargas, Anna Gavalda et les écrivains cités ci-dessus y sont passés). Ambiance conviviale et détendue, selon l’expression consacrée, et l’on peut vraiment discuter avec eux (ce qui est rarement le cas dans les salons du type Paris).



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7 janvier 2009 3 07 /01 /janvier /2009 15:13
 Alors que chacun d'entre nous se pique, à l'instar de Florent Pagny, d'une totale liberté de penser, la question mérite d'être posée.
D'autant que la réponse à laquelle je suis parvenu après des heures de méditation intensive met à mal cette illusion de libre-arbitre qui nous habite tous lorsque nous nous promenons au milieu des étals des librairies :
on achète un livre,  parce qu'on nous a dit de le faire.
Tout simplement.
Bien sûr, le "on" en question peut revêtir une multitude de formes, plus ou moins pernicieuses : cela va du bon ami qui déboule dans votre salon en s'écriant: "Sapristi, ce bouquin envoie du steak ou je ne m'y connais pas ! Il faut absolument que tu le lises !" à l'article de magazine spécialisé (la Quinzaine littéraire, Biba, etc), en passant par la publicité toute bête.
Quoiqu'il arrive une chose est sûre : l'acte d'achat est toujours motivé par une influence extérieure. Et même lorsqu'on batifole autour de la table des nouveautés, on ne passera jamais à la caisse sans au moins avoir lu la quatrième de couverture qui n'est rien d'autre, tout compte fait, qu'une incitation à dépenser son argent.
Bon, vous allez me dire que je suis en train d'enfoncer une porte déjà largement ouverte. C'est vrai, c'est probablement parce que ça fait moins mal. Mais restons sérieux un instant, car vous êtes cependant loin d'imaginer à quel point le système de la prescription est efficace lorsqu'il est appliqué à grande échelle...
En Angleterre, il existe depuis plusieurs années un talk-show animé par un couple, Richard Madeley et Judy Finnigan, la cinquantaine propre sur eux, qui draine une dizaine de millions de téléspectateurs. Une fois par semaine, nos deux comparses présentent un livre qui leur a drôlement plu. Bon, pour dire la vérité, c'ets la productrice de l'émission qui les choisit pour eux, mais on s'en fiche, le résultat est le même : dans les semaines qui suivent la diffusion, les ventes dudit roman augmentent de 3000% ! Rien que sur la première année, les ventes tout titre confondu se sont élevées à 25 millions d'exemplaires et on en est à 60 millions aujourd'hui. Impressionnant, d'autant que les bouquins mis en valeur ont bien souvent été écrits par des auteurs inconnus du grand public, voire par des primo romanciers, comme Victoria Hislop qui après que son livre fut élu "lecture de l'été 2006", s'est maintenu pendant 14 semaines au top des ventes. Pivot, à côté, c'est la force de frappe d'une feuille de choux ronéotypée à 50 exemplaires.
 Tout cela est bien beau (surtout pour les éditeurs) mais pose tout de même un problème que je m'en vais illustrer sans plus attendre.
Je lisais l'autre jour le blog de Pierre Assouline (l'homme qui a arrêté récemment le café) lorsque je tombe sur un billet consacré à un petit livre de Philippe Garbit "L'invitation à dîner : Et autres récits venimeux ". L'article est tellement bien tourné, flatteur sans être obséquieux, attirant sans être aguicheur que mon sang ne fait qu'un tour : direction amazon, clics frénétiques, numéro de carte bleue, vous connaissez le topo. Quelques jours plus tard je reçois le livre, que je commence en me pourléchant mentalement les babines (sinon ça fait pas propre). Et là, grosse, énorme déception : c'est carrément mauvais, à tel point que j'abandonne ma lecture pour me plonger aussitôt dans une revigorante étude du catalogue des 3 Suisses (Printemps/Eté, celui avec les maillots de bain) qui me permet d'oublier un peu mon désarroi.
 Par la suite, je n'ai pas pu m'empêcher de me demander si je n'avais pas été la victime d'un "coup de pub" de la part de Pierre Assouline, qui aurait tout simplement donné un petit coup de pouce à un bon vieux copain par le truchement de son blog. Bien sûr, je ne le saurais jamais, mais le doute subsistera pour toujours dans mon esprit désormais tourmenté.
 D'où ma conclusion, effrayante (je vous aurais prévenu) : s'il est possible de berner avec une telle déconcertante facilité un être aussi évolué et malin que moi, imaginez ce que cela doit être pour vous, pauvres petites créatures naïves et crédules ! Tous ces livres que vous vous êtes empressés d'acheter, bercées par les douces et fallacieuses promesses d'une voix faussement amie ! Toutes ces fois où vous avez succombé au mielleux PPDA vous jurant, la main sur le coeur et une larme au coin de l'oeil, qu'il n'avait de sa vie jamais rien lu d'aussi beau (ce qui, dans un sens n'était pas faux, car PPDA ne lisait PAS les livres qu'il présentait, et se contentait le plus souvent d'une fiche de lecture rédigée à la hâte par une jeune et accorte stagiaire).
Aussi je me permets de vous adresser cet avertissement solennel : méfiez-vous des conseils, surtout s'ils proviennent d'une voix soi-disant autorisée et compétente. Souvenez-vous du cas ô combien emblématique des "Bienveillantes", le livre que tout le monde a acheté, mais que personne n'a lu (du moins jusqu'au bout). N'y a-t-il pas eu là encore, et sur une grande échelle, tromperie sur la marchandise ?
Le plus cocasse, c'est que les auteurs en devenir auto-édités sont parfois eux aussi tenté par le coup de la prescription. Sauf qu'ils ne connaissent aucun journaliste qui pourrait parler de leur livre (et d'une manière générale, il ne connaissent personne qui serait en capacité de parler de leur livre, puisque personne ne l'a lu). Ils se lancent donc à corps perdu dans une pathétique opération que je nommerai l'auto-buzz, et qui consiste à submerger les forums littéraires d'appréciations outrageusement dithyrambiques sur leur production, signées par une multitude de pseudos qui ne dissimulent en réalité qu'une seule personne : le machiavélique auteur. Certains vont même jusqu'à conclure leur logorrhée hagiographique par un touchant : "Je tiens à préciser que je ne suis pas l'auteur de cet incroyable chef d'oeuvre, ni un de ses amis, mais que j'aurais bien aimé parce que vraiment, qu'est-ce que c'est bien". Autant dire que la plupart du temps, ce genre de combine se solde par une augmentation des ventes de 3000% (3000% de zéro restant malgré tout assez proche du néant).
Il existe toutefois un auteur qui a su pousser cette démarche jusqu'à l'absurde avec un talent certain, c'est J-P Bâchet. Le personnage m'a tellement intrigué que j'ai voulu commander son livre "Eddy Magior contre les puissances des ténébres" (ce titre...) . Las, mal m'en a pris : j'ai attendu la livraison pendant plus de deux mois, en vain : l'éditeur, sollicité par amazon, était dans l'incapacité de fournir.
 Alors, J-P, si tu me lis...


On ne l'a fait pas à Florent Pagny : même sa
 feuille d'impôt, il refuse de la lire.


En complément, voici un lien vers une émission d' "arrêt sur image" qui traite de la critque et de la complaisance à la télévision, très intéressant.
LIEN
Merci à Aphasique pour cette information


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15 novembre 2008 6 15 /11 /novembre /2008 16:17

Ce samedi matin, j'arrive sur le salon vers 10 h 20. On nous avait dit 10 h, mais mon esprit d'incorrigible rebelle m'a dicté de reprendre un croissant, un pain au chocolat et un double expresso au buffet de l'hôtel. Ensuite, j'ai fait un tour dans le fameux marché de Brive, à l'affût du fantôme de Georges Brassens. Après avoir soulevé quantité de bottes de radis, de salades de toute espèce et de clapiers à lapin sous l'oeil réprobateur des commerçants du cru, j'en ai finalement conclu qu'il avait dû s'envoler depuis longtemps. Devant la halle qui accueille la foire, une foule compacte et disciplinée attend patiemment de se faire palper par la police locale avant que de côtoyer enfin le gratin de la littérature française. Pour ma part, je passe par la porte réservée aux auteurs, en brandissant crânement mon badge sous le nez du cerbère chargé des contrôles.

A l'intérieur, la foule s'écoule en masse compacte le long des stands, telle une coulée de lave (c’est beau, non ?). J'arrive péniblement à ma table de signature encore vierge, où un vieux monsieur m'attend. "Voilà, m’explique-t-il, j'ai 83 ans et j'ai dans l'idée d'écrire un roman. Pour tout dire, j'ai déjà commencé, j'en suis à la trentième page."
"Bien, bien" rétorquai-je fort à propos.
Il poursuit : "C'est que j'ai eu une vie bien remplie, j'ai rencontré beaucoup de gens passionnants, j'ai même taillé le bout de gras avec Saddam Hussein, pendant 20 minutes".
"Bien, bien" répliquai-je du tac au tac (Il faut dire que je ne suis pas encore bien réveillé).
Le vieux monsieur est charmant, il finit par acheter mon livre, que je lui dédicace avec le plus grand plaisir. "Les affaires démarrent très fort ! " me dis-je in petto. Les deux heures suivantes n'auront hélas de cesse de contredire mon bel enthousiasme initial, et, abruti par le brouhaha ambiant, je manque à plusieurs reprises de m'écrouler de ma chaise, accablé par l'ennui et le désœuvrement.

Vers 11 h je décide de me ressaisir et pars faire un tour dans les allées. Aujourd'hui, toutes les vedettes sont à pied d'oeuvre, et ça dédicace à tour de bras derrière les stands assaillis par une foule en extase : "Oh ! Regarde ! C'est Sébastien Follin !" J'ignorais pour ma part que ce brave garçon avait écrit un livre... Et là ! Yves Rénier ! Ah... Lui aussi écrit ? Mais... N'est-ce pas Hervé Villard, là ? Mais si ! Juste à côté de Jean-Louis Debré (ils doivent avoir des foules de choses à se raconter). Un peu plus loin, c'est Antony Delon, de l'autre côté, Mylène Demongeot. D'un coup, je suis fier d'habiter en France, cette belle patrie où tout un chacun (dès lors qu'il passe à la télé) est irrémédiablement habité par la grâce de l'écriture. Vous qui n'arrivez pas à terminer votre deuxième chapitre, que la honte s'empare de vous à tout jamais ! Et prenez donc exemple sur Sébastien Follin qui, malgré son travail harassant de météorologiste cathodique, trouve le temps - et le talent !- de torcher 250 pages comme qui rigole !

De retour sur mon stand, je fais part de ma ferveur cocardière à Caroline Sers qui, sans aucun ménagement pour mon insondable candeur, remet les pendules à l'heure : ces gens, pour leur grande majorité, n'écrivent pas leur livre... Pas le temps, et surtout pas les capacités...

La claque !

Qui alors ?

Des "nègres" (les Anglo-saxons parlent plus élégamment de "ghostwriter"), généralement appartenant au milieu de l'édition, qui dans l'ombre triment pour les autres. Oh ! Ils ne sont pas particulièrement à plaindre, chacun de ces travaux de commande leur rapporte entre 15 ou 20 000 euros forfaitaires, parfois même ils bénéficient d'un pourcentage sur les ventes. Mais si financièrement, il s'agit d'une bonne affaire, qu'en est-il de l'ego, hein, le fameux ego de l'auteur ? Eh bien ! Ils s'arrangent avec, plus ou moins bien. Lou Durand, le "nègre" de Paul-Loup Sulitzer (qui, s'il sait compter, ignore tout de l'écriture) était malade de constater que ses romans passaient inaperçus alors que ceux de son "employeur" se vendaient dans le même temps comme des petits pains. Comme on le voit, on aurait d'ailleurs tort de croire que seules les "vedettes de la télé" n'écrivent pas leur livre, quelques romanciers jouissant d'un certain renom n'ont fourni, dans le meilleur des cas, que de vagues trames écrites avec le pied. Mais leur nom ne circule pas, car une clause de confidentialité figurant dans le contrat rend les "ghostwriters" particulièrement méfiants : il serait dommage de tuer la poule aux oeufs d'or pour le simple plaisir de fanfaronner auprès de ses connaissances... Sachez toutefois qu'un prix Goncourt lycéen fait partie de ces auteurs manchots, ainsi qu'une belle Eurasienne au patronyme lacanien. Elle était d'ailleurs présente à Brive, et j'ai beaucoup ri à la voir minauder face à un admirateur qui lui déclarait, la voix vibrante d'émotion : "J'aime beaucoup ce que vous faites".

Deux anecdotes piquantes pour en finir : un éditeur avait demandé à un rugbyman célèbre un livre de mémoire. Comme toujours dans ces cas-là, on a dépêché un "nègre" pour "accoucher" le futur "auteur". Lors de leur première rencontre, le sportif expose sa conception de l'ouvrage devant l'écrivain médusé : voilà, il voudrait faire un truc comme le bouquin de Bernadette Chirac, là, celui où elle donne son avis sur la vie, la mort, Dieu, la famille et la couleur des chaussettes de son mari, un machin profond, quoi. Il a fallu que notre homme déploie des trésors de patience et de diplomatie pour convaincre le rugbyman que euh, ben ce qu'attendait peut-être le lecteur potentiel, c'était plus des histoires de maillots mouillés et de troisième mi-temps totale folie que des considérations philosophiques sur le sens de la vie.

Deuxième histoire : un académicien, qui a pour habitude de ne pas écrire ce qu'il signe (sans doute trop débordé par les travaux de l'Académie) téléphone à son écrivain-soutier : "J'ai lu mon livre. Félicitations, c'est tout à fait moi !" A ce stade-là, on peut carrément parler de schizophrénie...

Bon, tout cela est bien joli, mais Marc Lévy, il écrit ses romans, lui ? Alors là, nous nous portons personnellement garant de l'honnêteté absolue du bestseller-man en la matière. Preuve indiscutable : si ses histoires étaient écrites par d'autres, elles seraient forcément mieux, beaucoup mieux torchées. Une autre immaculée pure et dure : Amélie Nothomb. Elle est d'ailleurs là, à quelques mètres de moi, sur le stand Albin Michel. A ses côtés, sa soeur qui a écrit, tenez vous bien, un livre de recettes intitulé "La cuisine d'Amélie". Une affaire de famille, en somme, au contenu à n'en pas douter tout à fait passionnant... Mais cela ne s'arrête pas là. A la gauche d'Amélie se trouve Tom Verdier. Qui c'est celui-là ? Le petit ami d'Amélie, tout simplement (oui, je sais, moi aussi, jusqu'à présent je pensais qu'Amélie Nothomb était un être asexué, ou alors se suffisant à lui-même, comme les escargots). On imagine facilement que sans le petit coup de pouce providentiel de l'écrivaine à succès, le roman – sans doute exquis - de ce joueur de poker plus ou moins professionnel serait probablement resté à jamais au fond d'un tiroir.

Devant notre table passe une quantité impressionnante de badauds, en transit pour la planète Amélie. Du coup, c'est à peine s'ils jettent un oeil morne sur les livres qui s'étalent devant eux. Il faut dire que l'on ne fait pas beaucoup d'efforts pour retenir le chaland. Pas comme ceux d'en face, une maison d'édition régionale dont les auteurs se dépensent sans compter pour refourguer leur production. J'observe, fasciné, la tactique d'un vieux monsieur qui, les mains dans les poches, l’air de rien, se tient à un mètre de son emplacement. Dès que quelqu'un passe, il fond telle l’araignée sur sa proie, le dirige subtilement mais fermement vers son étal et commence à lui faire l'article. Rien que de le regarder faire, je sens la fatigue m'envahir. Je suis à deux doigts de piquer du nez lorsque Emilie vient nous faire un brin de causette. Elle vient de s'entretenir longuement avec Christine Devier-Joncourt qui est présente incognito sur le salon (et pour cause, depuis "la putain de la république" et sa fugace exposition médiatique, elle n'a plus rien fait). En fait, elle est à la recherche d'un éditeur jeunesse pour publier un roman illustré (par ses soins) se situant, selon elle, entre "J-K Rowling et J.R.R Tolkien", en toute modestie, bein sûr. Elle voudrait cependant le signer de son nom, car à son avis, il jouit encore d'une certaine notoriété. Imaginez le casse-tête pour le staff marketing d'une maison d'édition chargé de promouvoir un livre jeunesse écrit par "la putain de la république" ! Emilie lui a gentiment suggéré d’envoyer son manuscrit par la poste.

 

L'après-midi s'étend, interminable... A 7heures moins le quart, les nerfs prêts de craquer, on quitte le stand. Au passage, Bettina Heinrichs m'interpelle : "Vous venez en boîte, ce soir ? Tout le monde y sera !" Ca serait avec plaisir. Reste à convaincre mes collègues, mais ça ne sera pas chose facile, car eux, des salons, ils en mangent toute l'année, alors le soir, c'est dodo. On verra bien...

On a vu. Ou plutôt, on n’a rien vu du tout. Après le resto, plutôt très bruyant,  on avait tous la tête comme des citrouilles, avec une seule idée en tête : le lit (mais juste pour dormir). Je regrettais un peu ma soirée en boîte : j'imaginais les dizaines de tableaux croquignolets que j'aurai pu vous rapporter ici même...

Une fois réfugié dans ma chambre, je réalise que je me suis trompé de jour pour le film coquin : samedi soir, c'est maintenant ! Chouette ! Ben non, pas chouette du tout. En fait, je suis réellement fatigué. Je me glisse sous les draps, le casque du mp3 sur les oreilles... Bang Gang...

 

Et rideau !


De notoriété publique, Antony Delon est un des plus mauvais acteur du monde.
En revanche, c'est à n'en pas douter un brillant écrivain.



Hervé Villard, en panne de Régécolor, mais pas d'inspiration.
(A sa gauche, le crâne altier de J-L Debré, occupé à dédicacer un Kleenex)

 

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